Travail en situation de confinement, quels risques pour la santé des enseignants ?
26/04/2020 par F3SCT (Formation Spécialisée Santé Sécurité Conditions des Travail) – Académie de Versailles
« Moins de transport, moins de contrôle direct de la hiérarchie et sans doute aussi possibilité d’une meilleure conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle… Sur le papier, le télétravail coche pas mal de cases des remèdes antistress déployés par les entreprises ». Ainsi débutait un article publié par Santé et Travail en Novembre 2019.
Enfin les « cols blancs » des entreprises allaient pouvoir travailler comme les enseignants qui, eux, ont le choix de leurs horaires de travail, de l’organisation de leur travail…
La protection de la santé des personnels qui continuent à être présents dans les établissements est bien sûr au cœur des préoccupations des représentants FSU en CHSCT, à tous les niveaux. Mais, au moment où nous nous retrouvons tous en situation de confinement et pour la plupart d’entre nous en « travail continu » à la maison, un premier bilan des difficultés rencontrées et des risques professionnels s’impose.
=> Pour cela, remplissez l’enquête en ligne réalisée par le SNES-FSU Versailles.
=> N’hésitez pas également à contacter les sections départementales du SNES-FSU pour poser des questions, signaler des situations compliquées, des pressions du chef d’établissement…
SNES-FSU 78 : snes78@versailles.snes.edu,
SNES-FSU 91 : snes91@versailles.snes.edu,
SNES-FSU 92 : snes92@versailles.snes.edu,
SNES-FSU 95 : snes95@versailles.snes.edu
=> Enfin il est essentiel de signaler les difficultés que vous pouvez rencontrer et la dégradation de vos conditions de travail en remplissant le registre de Santé et de Sécurité au Travail (RSST). Cette démarche peut être réalisée à distance. Consultez notre article.
C’est un geste essentiel qui nous permet d’intervenir auprès de l’Administration (DSDEN et Rectorat) et d’agir pour l’amélioration des conditions de travail de tous les personnels.
=> Le SNES-FSU vous suggère également des gestes de protection et des conseils...
Des conditions de travail exceptionnelles
- 1er principe : En cette période de crise sanitaire, faisons nôtre cette maxime : « A l’impossible, nul n’est tenu ! ». Surtout lorsque rien ou trop peu a été fait pour anticiper… Il ne faut donc pas culpabiliser de l’insuffisance des ENT, de certains dysfonctionnements des classes virtuelles du CNED… Depuis des années, le Rectorat n’a pas suffisamment développé de formation continue concernant ces nouvelles pratiques d’enseignement. Et l’Éducation nationale met à notre disposition des outils souvent très inadaptés, insuffisants et mal calibrés. Quant au matériel, rien n’est prévu pour aider les personnels à se doter d’outils indispensables à leur travail au quotidien.
- 2ème principe : L’employeur doit veiller à la sécurité et à la protection de la santé (physique, mentale et sociale) des agents placés sous son autorité. Ne pas hésiter à rappeler cela à votre chef d’établissement et lui demander ce qu’il fait en la matière pour ses personnels. Certains, par leur communication et leurs sollicitations inappropriées, exposent inutilement les personnels… Ne pas céder à toutes les injonctions de l’Administration et prendre le temps de recréer du collectif avec les collègues de travail via des contacts téléphoniques ou des groupes de discussions… Ne pas hésiter également à remplir le registre SST de votre établissement pour signaler les difficultés rencontrées et la dégradation des conditions de travail que vous constatez.
- 3ème principe : comprendre et décrypter la « continuité pédagogique »
L’expression « continuité pédagogique » est particulièrement délétère. Cela laisse supposer qu’une crise de cette ampleur, que cette « guerre » selon le président de la République, ne devrait avoir aucune incidence sur les apprentissages des élèves, de ces jeunes qui vont être confinés pendant plusieurs semaines. Or la continuité pédagogique, la continuité du service public, est une responsabilité de l’État, pas la responsabilité individuelle de ses agents. Pour que ces derniers puissent l’assurer, il faut un cadre bien défini et des moyens appropriés.
=> Voir notre article : Avec le SNES-FSU comprendre et décrypter la « continuité pédagogique » vantée par notre Ministre.
- 4ème principe : Agir comme les professionnels de l’acte d’enseigner que nous sommes, tout en pensant que :
• l’enseignement à distance, ce n’est pas une journée de classe comme les autres ;
• notre rôle c’est de maintenir le lien entre les élèves, leurs enseignants et les apprentissages, tout en ne développant pas d’anxiété chez les élèves les plus fragiles ou les moins bien équipés ;
• nous devons essayer de ne pas accentuer la fracture sociale et numérique qui existe pourtant chez beaucoup de nos élèves et de leur famille.
Les risques professionnels
Quels sont les risques professionnels auxquels nous sommes exposés, plus particulièrement en cette période ?
Les risques professionnels interagissent dans les troubles qu’ils provoquent sur notre santé.
1. Les risques psycho-sociaux, autrement nommés les RPS, sont les risques psychiques qui résultent d’une mauvaise organisation du travail :
- symptômes : fatigue, prise ou perte de poids, perte de sommeil, mal de dos, sentiment de mal faire son travail, culpabilisation, sentiment de mise à l’écart…
- causes (dans la situation présente) : horaires de travail à rallonge et atypiques, possibilités de coopération entre pairs amoindries, perte d’autonomie dans son travail, sentiment d’isolement et d’une plus grande précarité face à une situation qu’on ne maitrise pas, difficultés face à des outils mal maîtrisés ou inadaptés... Tous les ingrédients du cocktail RPS !
2. Les troubles musculo-squelettiques appelés également TMS : il s’agit de troubles de l’appareil locomoteur, provoqués ou aggravés par l’activité professionnelle.
- symptômes : douleurs musculaires, gêne fonctionnelle plus ou moins importantes dans les gestes, le fameux mal de dos qu’on néglige ou le poignet fragile, l’épaule moins mobile…
- causes (dans la situation présente) : mauvaise installation de son poste de travail, souvent par manque de place (comment s’en étonner au prix du m² en région parisienne), et exposition longue en étant mal installé, difficulté de faire du sport du fait du confinement et du temps de travail qui a explosé…
3. La fatigue oculaire : temps long devant les écrans, outils inadaptés…
La cause principale des trois risques est le temps passé devant les écrans alors protégeons-nous en utilisant notre droit à la déconnexion, sans culpabiliser le soir, le week-end et pendant les vacances.
Quant aux gestes simples de protection, venez les découvrir dans les deux documents ci-contre :
- conseils pour le travail à distance des personnels,
- organisation de votre espace de travail à domicile.
Les représentants des personnels de la FSU interviennent chaque semaine, directement ou dans le cadre des réunions du CHSCT, auprès des DSDEN et de la Rectrice. Voici quelques exemples de nos demandes :
- un changement de ton dans le discours vis-à-vis des personnels et une réelle confiance dans leur professionnalisme, ceci à tous les niveaux (de la part du Ministre, de la Rectrice, des IPR et des chefs d’établissements),
- des mesures de protection vis-à-vis des agents (masques et mesures barrières à respecter) pour ceux qui sont dans les établissements, information sur les gestes de prévention des risques liés au télétravail pour tous,
- des mesures de nettoyage et de désinfection des établissements qui accueillent les enfants de soignants,
- un réel suivi médical des personnels à risques ou exposés,
- le rappel de l’importance d’un confinement strict qui ne doit pas être entravé au nom de la continuité pédagogique…
Étant donnée l’impréparation de la gestion de crise, vos représentants du personnel en CHSCT font valoir :
- qu’une réelle formation initiale et continue aux nouvelles technologies est indispensable,
- que la question du matériel professionnel prend tout son sens aujourd’hui, comme celle des outils numériques de l’institution (classes virtuelles, logiciels de visioconférence, ENT…).
Cette question qui est déjà posée par le SNES-FSU depuis des années, devra être traitée par le Ministre après la crise sanitaire. Pour cela, il est impératif de faire remonter officiellement tous les problèmes rencontrés en remplissant le registre SST de votre établissement.
Depuis le début de la crise sanitaire, l’Administration, à tous ses niveaux, en consultant et en réunissant très régulièrement les CHSCT (départementaux, académique et ministériel) pour des visio-conférences, reconnaît le caractère absolument indispensable de ces instances.
Leur existence même est pourtant menacée par la loi Fonction publique, promulguée le 6 août 2019, qui prévoit la fusion des CT et des CHSCT, programmant ainsi la disparition des CHSCT (même si, à ce jour, les décrets d’application ne sont pas parus).
=> Le SNES-FSU n’a cessé de dénoncer cette loi et ses conséquences délétères pour la Fonction publique. La crise que nous traversons est en train d’en démontrer le caractère irresponsable.
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