Comité d'Hygiène, de Sécurité

et des Conditions de Travail

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FS 94 Décembre 2024

12/12/2024 par FS SST CT Val-de-Marne

 

Déclaration liminaire de la FSU, pour la FS-SSCT D 94 du mercredi 11 décembre 2024

 

Madame la Présidente de la FS-SSCT du Val-de-Marne, Mesdames, Messieurs les membres de la Formation spécialisée,

 

Cette réunion de la FS-SSCT se déroule encore une fois dans un contexte où nous n’avons plus ni Ministre ni Gouvernement, et toujours sur fond de nouvelles attaques contre la fonction publique et les fonctionnaires. En octobre nous nous vous alertions sur le respect du droit à se soigner mis à mal par le vote des sénateurs et la vague de dénigrement de la Fonction publique, dont les enseignants et personnels de l'Éducation sont les 1ères victimes. Nous ne nous trompions pas puisqu’entre la Loi de Finances, le décret concernant les arrêts de travail pour les Contractuels et les déclarations de Nicolas Sarkozy, les droits et plus encore l’image des personnels ont été foulés aux pieds, avec la bénédiction du gouvernement sortant, poussant les collègues à une journée de grève avec un taux de grévistes quasiment historique.

Le gouvernement est tombé mais l'inquiétude est toujours là. Le décret sur la prise en charge des Congés Maladie Ordinaire pour les PE contractuels est à l'étude au Conseil Commun de la Fonction Publique aujourd’hui même : sera-t-il adopté ? Les mesures de réduction de la rémunération pendant les CMO pour les fonctionnaires titulaires prévues par la Loi de finances 2025 planent toujours au-dessus de nos têtes. Et avec une réduction notable du salaire, c’est bien en deçà du secteur privé qu’il s’agit de nous “aligner”. Soulignons que la diminution du salaire à 90% pénaliserait davantage les femmes qui représentent ⅔ des fonctionnaires alors que par ailleurs la loi de transformation de la fonction Publique promet l’égalité homme/femme. 

Le gouvernement met en avant le soi-disant absentéisme des fonctionnaires au lieu de parler d’absence. Le mot “absentéisme” a bien une connotation négative laissant entendre que les absences des personnels ne seraient pas justifiées (stages, raisons d’ordre médicale). Cette vision infantilisante des agents est tout bonnement insupportable et contribue au #profbashing#.

Si les arrêts maladie augmentent, peut-être faudrait-il s’interroger sur les raisons, sur les phénomènes de burn out, de fatigue, de sentiment de dégradation des conditions de travail, de perte de sens du métier et de recul de l'âge de départ à la retraite ? 

 

Concernant la santé et la sécurité au travail, depuis maintenant 7 ans, nous avons entendu de nombreuses promesses :

  • une amélioration des conditions de travail ;

  • une meilleure reconnaissance ;

  • une amélioration des rémunérations ;

  • des progrès pour l’égalité homme-femme ;

  • Un choc d'attractivité…

On nous a également demandé de travailler plus longtemps, tout en nous promettant d'améliorer les fins de carrière.  Pourtant même la Cour des comptes, dans une publication du 26 novembre, met en garde sur la gestion calamiteuse des fins de carrières des enseignants. 

A l’heure des bilans, l’attractivité n’a jamais été aussi faible, les conditions de travail n’ont jamais été aussi délétères. Notamment en raison d’une inclusion à l’école qui se fait toujours sans moyen, en raison des injonctions qui ne cessent de se multiplier; modifications régulières des programmes, augmentation des dispositifs qui renient notre professionnalité et notre expertise. 

 

Enfin, certains de nos collègues contractuels de nationalité extra-européenne sont victimes du durcissement de la répression contre l’immigration dans notre pays. Sous la pression du RN et du lobby anti-immigration, les Préfectures réduisent drastiquement les créneaux de RDV. Et des collègues PE ou AESH contractuel.le.s risquent de se retrouver de fait en situation irrégulière. Notre administration fait si peu de cas de ses agents qu’elle n’a prévu aucune solution d’urgence, aucun contact à la Préfecture, aucune intervention. Citons ici le cas de Samuel, PE depuis 1 an, qui sollicite depuis septembre de l’aide pour obtenir un rdv afin de renouveler son titre de séjour qui prend fin en décembre. La seule réponse qu’a reçu Samuel à sa demande d’aide a été que l’administration ne le licenciera pas immédiatement s'il pouvait faire la preuve d’un rdv pris à la préfecture. Manifestement, l’administration ignore le parcours du combattant que constitue l’obtention d’un rendez-vous en préfecture.  Situation ubuesque qu’il doit gérer en plus d’une classe accueillant un enfant dont ni la notification IME, ni la notification AESH individuel ne sont respectées. 

A la dégradation du métier s'ajoutent les situations que nous évoquons régulièrement en FS-SSCT sur la dégradation du bâti avec la multiplication de risques amiante mais aussi des fuites, inondations, inhalation de gazs toxiques (à Alfortville par exemple), manquements à la sécurité.

 

Cette période nous avons ainsi vu se multiplier les agressions et menaces de parents d’élèves ou personnels municipaux contre les équipes. A Thiais, à Cachan, à Ivry, les atteintes à la sécurité des collègues se sont multipliées. Et dans toutes ces situations nous constatons que la réponse de l’institution n’est pas à la hauteur du sentiment d’insécurité des équipes. 

Nous saluons certes la présence sur le site du rectorat d’un “Guide de prévention sur les situations de harcèlement”, bien qu’il soit peu adapté aux réalités de l’enseignement, et surtout peu diffusé et difficile à trouver. 

Mais il nous semble primordial que les équipes se sentent soutenues, et que les IEN procèdent systématiquement à un rappel généralisé à la Loi, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. 

Les relations avec les Mairies deviennent aussi difficiles et là encore les collègues ont le sentiment d’être abandonné.e.s par la hiérarchie.

A St-Maur, c’est la responsable du service enfance qui a pu hurler sur une directrice sans sanction ni mise à l’écart. Et dans le cadre de la rénovation d’une école, la Mairie refuse depuis presque un an de répondre aux questions concernant le risque amiante, impose aux personnels de faire et défaire des cartons et de travailler le mercredi, prévoit de détruire bureau de direction et salle des maîtres, et s’assied sur le droit du travail malgré de nombreux rappels. La directrice et les enseignantes ne se sentent encore ni écoutées, ni épaulées.
Enfin, revenons sur le fonctionnement du dispositif Stop-Discri. Ce dispositif ne relève certes pas de la FS SSCT départementale. Mais nous avons été au regret d’apprendre que certaines situations qui ont été suivies ici, et ont donné lieu à des saisines, n’ont obtenu aucun traitement RH. Nous nous interrogeons donc aujourd’hui sur la volonté réelle de l’administration de faire vivre cet outil. 

Un autre point ayant nettement compliqué cette 1ère période est le flou sur la mise en place des ENT conventionnés. Les enseignants, qui s’étaient formés sur leur temps personnel depuis la crise sanitaire, se sont vu imposer des changements de pratiques sans aucune concertation. La mise en place s’est faite sans directive réellement annoncée avec des injonctions contradictoires (interdiction des autres ENT, possibilité de les utiliser…), sans instruction précise, et toujours à l’oral. Des questions sur l’intérêt du positionnement départemental perdurent. Des formations ont été annoncées et n’ont pas eu lieu. Des outils ont été proposés mais pas toujours utilisables pour tous les niveaux. Dans la majorité des écoles maternelles, cela conduit purement et simplement à la suspension de la communication quotidienne avec les familles, et là encore les enseignants se sentent empêchés de travailler et soumis à une enième injonction incompréhensible.  

 

Dans le second degré, les élus de la formation spécialisée sont beaucoup intervenus ces dernières semaines afin d’aider des équipes en souffrance suite à des méthodes de management brutal. Les conditions de travail se dégradent et les relations entre les personnels et leur direction se tendent. Nous assistons parfois à des entretiens houleux voire brutaux au cours desquels les droits des personnels sont bafoués et dénigrés. Les élus ou représentants syndicaux sont appelés en catastrophe dans des situations de violence importante où le dialogue est absent et où les textes ne sont pas respectés. Ce fut le cas au collège Rol Tanguy de Champigny (actuellement en grève jusqu’à demain), mais également au collège Perrin et Albert Cron du Kremlin Bicêtre, Rosa Parks de Gentilly, aux lycées Budé de Limeil Brévannes, Saint Exupéry de Créteil, Branly de Nogent-sur-Marne, pour n’en citer que quelques-uns. Nous intervenons pour venir en aide aux personnels dans près de 30 établissements sur les 146 que compte le département ; ce chiffre important illustre la souffrance quotidienne des enseignants et enseignantes du secondaire. 

Ces problèmes de management brutal, mêlant infantilisation des personnels et agressions verbales et méprisantes, nous permettent de faire l'hypothèse qu'il y a sans doute un réel problème a minima de formation des chefs de service avec lesquels nos collègues travaillent tous les jours de la semaine, qui ont par ailleurs la compétence exclusive de définir leur service et leur emploi du temps.

Les élus des personnels rencontrent de plus beaucoup de difficultés pour entrer dans les établissements, on leur en interdit l’accès, ou on complique leur travail d’information notamment au sujet des risques que les personnes encourent au contact de l’amiante. Ce n’est pas en cachant les problèmes qu’on les résout. Nous demandons formellement de rappeler le droit des représentants syndicaux d’accéder aux établissements scolaires, et que le reproche qui leur est fait stipulant qu’ils doivent faire preuve de courtoisie en prévenant de leur présence avant leur arrivée n’est pas une obligation et ne doit pas nous empêcher d’exercer le droit syndical, particulièrement en cas d’urgence entraînant une impossibilité précisément de prévenir de notre arrivée. 

Au travers de nos tournées dans les différents établissements du département nous continuons à constater la méconnaissance des personnels au sujet des dangers liés à l’amiante et l’absence y compris dans des établissements pourtant notoirement connus pour la présence d’amiante de DTA à jour et de DUERP. Malgré tout le travail réalisé en instances FSA et FSD la prise en compte de la santé des agents et agentes dans les établissements scolaires piétine.

Au cours de nos tournées nous avons également constaté la grande inégalité d’un établissement à l’autre dans l’application du choc des savoirs. Certains établissements faute de moyens supplémentaires ne l’ont pas appliqué du tout. D’autres l’ont fait au détriment des disciplines autres que les français et les mathématiques. Parfois il y a des groupes de niveaux, parfois ce sont des groupes hétérogènes et réduits. Nous constatons une grande inégalité de traitement des élèves du fait de cette réforme imposée sans moyens. L’incertitude liée à la situation politique entraîne l’incertitude sur l’avenir de cette réforme et une sourde angoisse continue de régner en salle des profs à ce propos. Ne pas pouvoir se projeter dans l’avenir génère beaucoup de stress dans les établissements. 

Les demandes institutionnelles, au lieu de se stabiliser, ne cessent de croître, sans que les enseignants en classe ne puissent souffler. L'asphyxie de la profession est de plus en plus palpable. Les propos tenus en salle des maîtres ou en salle des professeurs, voire sur les réseaux (loupe grossissante des problématiques réelles) ne laissent que peu de doute sur la dynamique des agents…

De là émerge de grandes interrogations. Y a-t-il une cellule au ministère qui a pour objectif de favoriser la dégradation des conditions de travail ? Pourquoi vouloir accélérer des réformes qui n’ont jamais été réellement évaluées, ni fait l’objet d’un réel temps d’analyse ?  Alors que les pays qui dominent le classement PISA ont mis des années à réformer leurs systèmes éducatifs en analysant et en laissant le temps aux changements de prendre, la France s'évertue à modifier perpétuellement les pratiques et les contenus, sans s’appuyer sur ses professionnels. À qui profitent réellement toutes ces dégradations des conditions de travail ?

 

Nous vous remercions pour votre écoute.

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